Le 20e célèbre la mémoire du Groupe Manouchian au travers d'une voie qui porte son nom depuis 1954. C'est pour son inauguration qu'Aragon a écrit un texte mis en chanson ensuite par Léo Ferré : l'Affiche rouge !
Missak et Mélinée Manouchian ont fait leur entrée au Panthéon le mercredi 21 février 2024 à l'occasion des 80 ans de l'exécution par les nazis des membres du Groupe Manouchian.
Le 21 février 1944, les 23 résistantes et résistants FTP-MOI du Groupe Manouchian sont exécutés. Ils étaient immigrés, juifs, communistes, ils sont morts pour la France, ils sont la France.
En ces temps où la menace fasciste plane, ne les oublions pas.
Éric Pliez
maire du 20e arrondissement
La rue du Groupe-Manouchian, hommage du 20e à la Résistance
En 1954, les impasses Fleury et du Progrès sont réunies en
une unique rue du Groupe-Manouchian. C’est le résultat d’une proposition portée
par des Conseillers d’arrondissement communistes du 20e qui
souhaitait rendre hommage à ce groupe de résistants.
La fresque hommage à Missak Manouchian
Une fresque en hommage au groupe Manouchian a été réalisée
non loin de la rue du même nom, à l’angle de la rue et du passage du Surmelin.
Elle est le fruit de l’initiative de la copropriété de l'immeuble, en
collaboration avec la mairie du 20e, le Conseil de quartier et l’association
Art Azoï.
Elle est l'œuvre d'
Artof Popof, street-artiste
mondialement reconnu.
La fresque hommage à Mélinée Manouchian
Le
street-artiste JBC a rendu hommage à Mélinée Manouchian en 2022 sur le mur de ce jardin partagé situé au milieu de la rue du Groupe Manouchian.
Mélinée Manouchian, la femme de Missak Manouchai est d'origine arménienne comme lui. Elle est devenue française à la Libération. Après la guerre, elle est devenue la première et principale biographe de son marie.
La fresque reprend une partie de
la lettre que lui a envoyée Missak Manouchian juste avant son exécution.
Un parcours mémoriel rue du Groupe Manouchian
Les bénévoles de l'association l'Affiche Verte Manouchian (AVM)
ont imaginé et conçu avec le soutien de la mairie du 20e un parcours
environnemental, mémoriel, artistique et pédagogique sur 350 m environ, afin de
rendre un hommage vivant original aux résistants du Groupe Manouchian et au
poème-chanson « l'Affiche rouge » écrit par Aragon pour l'inauguration de la
rue du Groupe Manouchian en 1955.
Un parcours audioguide
Le parcours mémoriel s'accompagne d'un parcours audioguide gratuit sur smartphone qui propose à chacun et chacun des ressources historiques complémentaires
sur l'histoire de la rue et celle du Groupe Manouchian dont le rôle a été
majeur dans la résistance à l'occupant nazi.
Une rue réaménagée dans le cadre d’Embellir votre quartier Télégraphe -
Pelleport - Saint-Fargeau – Fougères
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Plantation de 12 arbres rue du Groupe Manouchian
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Travaux de recalibrage et de végétalisation par
la plantation de 12 arbres
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Réfection de la structure de chaussée et pose de
mobilier vélo
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Pose de mobilier vélos
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Remise en œuvre de la signalisation horizontale
et verticale définitive
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Plantation de 12 arbres rue du Groupe Manouchian
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Travaux de recalibrage et de végétalisation par la
plantation de 12 arbres
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Réfection de la structure de chaussée et pose de
mobilier vélo
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Pose de mobilier vélos
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Remise en œuvre de la signalisation horizontale
et verticale définitive
L'Affiche rouge, du poème d'Aragon à la chanson de Léo Ferré
Vous n'avez réclamé la gloire ni les larmes
Ni l'orgue ni la prière aux agonisants
Onze ans déjà que cela passe vite onze ans
Vous vous étiez servi simplement de vos armes
La mort n'éblouit pas les yeux des Partisans
Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes
Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants
L'affiche qui semblait une tache de sang
Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles
Y cherchait un effet de peur sur les passants
Nul ne semblait vous voir français de préférence
Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant
Mais à l'heure du couvre-feu des doigts errants
Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA France
Et les mornes matins en étaient différents
Tout avait la couleur uniforme du givre
À la fin février pour vos derniers moments
Et c'est alors que l'un de vous dit calmement
Bonheur à tous Bonheur à ceux qui vont survivre
Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand
Adieu la peine et le plaisir Adieu les roses
Adieu la vie adieu la lumière et le vent
Marie-toi sois heureuse et pense à moi souvent
Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses
Quand tout sera fini plus tard en Erivan
Un grand soleil d'hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le coeur me fend
La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée ô mon amour mon orpheline
Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant
Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent
Vingt et trois qui donnaient leur cœur avant le temps
Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient la France en s'abattant.
Aragon/Léo Ferré
Strophes pour se souvenir/L’Affiche rouge
Le Groupe Manouchian
Le Groupe
Manouchian, c'est un groupe de résistantes et de résistants communistes. Il
s’agit de 23 membres des Francs-Tireurs et Partisans – Main-d'Œuvre Immigrée
(FTP-MOI), résistants de la région parisienne. On leur a donné le nom de leur chef, Missak Manouchian, immigré
arménien rescapé du génocide et figure de la résistance armée. Ils ont été
fusillés par l'occupant le 21 février 1944.
Le Groupe
Manouchian est également connu sous le nom de « l’Affiche rouge ». Il
s’agit d’une affiche de propagande nazie qui avait pour objectif d'assimiler
ces résistants à des terroristes, tout en jouant les cartes traditionnelles de
l'anti-bolchevisme, de la xénophobie et de l’antisémitisme.
L'affiche eut
sur la population l’effet contraire à celui recherché par les Allemands. Les
passants manifestèrent souvent des réactions de sympathie vis-à-vis des
résistants dont la photo avait été reproduite sur l'affiche, et les articles de
soutien furent nombreux dans la presse clandestine.
Les membres du « groupe Manouchian » exécutés
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Celestino Alfonso, Espagnol, 27 ans
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Olga Bancic, Roumaine, 32 ans (seule femme du groupe, exécutée en Allemagne le
10 mai 1944)
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Joseph Boczov, Hongrois, 38 ans - Ingénieur chimiste
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Georges Cloarec, Français, 20 ans
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Rino Della Negra, Italien, 19 ans - Footballeur du Red Star Olympique
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Thomas Elek, Hongrois, 18 ans – Étudiant
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Maurice Fingercwajg, Polonais, 19 ans
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Spartaco Fontanot, Italien, 22 ans
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Jonas Geduldig, Polonais, 26 ans
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Emeric Glasz, Hongrois, 42 ans - Ouvrier métallurgiste
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Léon Goldberg, Polonais, 19 ans
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Szlama Grzywacz, Polonais, 34 ans
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Stanislas Kubacki, Polonais, 36 ans
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Cesare Luccarini, Italien, 22 ans
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Missak Manouchian, Arménien, 37 ans
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Armenak Arpen Manoukian, Arménien, 44 ans
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Marcel Rajman, Polonais, 21 ans
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Roger Rouxel, Français, 18 ans
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Antoine Salvadori, Italien, 24 ans
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Willy Schapiro, Polonais, 29 ans
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Amedeo Usseglio, Italien, 32 ans
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Wolf Wajsbrot, Polonais, 18 ans
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Robert Witchitz, Français, 19 ans
La Lettre de Missak à Mélinée Manouchian
La lettre à de Missak Manouchian à Mélinée Manouchian, sa femme, également
résistante, qui inspirera Aragon pour son poème.
« Ma chère Mélinée, ma petite orpheline bien-aimée,
Dans quelques heures, je ne serai plus de ce monde. Nous
allons être fusillés cet après-midi à 15 heures. Cela m'arrive comme un
accident dans ma vie, je n'y crois pas mais pourtant je sais que je ne te
verrai plus jamais. Que puis-je t'écrire ? Tout est confus en moi et bien clair
en même temps.
Je m'étais engagé dans l'Armée de Libération en soldat
volontaire et je meurs à deux doigts de la Victoire et du but. Bonheur à ceux
qui vont nous survivre et goûter la douceur de la Liberté et de la Paix de
demain.
Je suis sûr que le peuple français et tous les combattants
de la Liberté sauront honorer notre mémoire dignement.
Au moment de mourir, je proclame que je n'ai aucune haine
contre le peuple allemand et contre qui que ce soit, chacun aura ce qu'il
méritera comme châtiment et comme récompense. Le peuple allemand et tous les
autres peuples vivront en paix et en fraternité après la guerre qui ne durera
plus longtemps. Bonheur à tous…
J'ai un regret profond de ne t'avoir pas rendue heureuse,
j'aurais bien voulu avoir un enfant de toi, comme tu le voulais toujours. Je te
prie donc de te marier après la guerre, sans faute, et d'avoir un enfant pour
mon bonheur, et pour accomplir ma dernière volonté, marie-toi avec quelqu'un
qui puisse te rendre heureuse.
Tous mes biens et toutes mes affaires je les lègue à toi à
ta sœur et à mes neveux. Après la guerre tu pourras faire valoir ton droit de
pension de guerre en tant que ma femme, car je meurs en soldat régulier de
l'armée française de la libération. Avec l'aide des amis qui voudront bien
m'honorer, tu feras éditer mes poèmes et mes écrits qui valent d'être lus. Tu
apporteras mes souvenirs si possible à mes parents en Arménie.
Je mourrai avec mes 23 camarades tout à l'heure avec le
courage et la sérénité d'un homme qui a la conscience bien tranquille, car
personnellement, je n'ai fait de mal à personne et si je l'ai fait, je l'ai
fait sans haine.
Aujourd'hui, il y a du soleil. C'est en regardant le soleil
et la belle nature que j'ai tant aimée que je dirai adieu à la vie et à vous
tous, ma bien chère femme et mes bien chers amis.
Je pardonne à tous ceux qui m'ont fait du mal ou qui ont voulu me faire du mal
sauf à celui qui nous a trahis pour racheter sa peau et ceux qui nous ont
vendus.
Je t'embrasse bien fort ainsi que ta sœur et tous les amis
qui me connaissent de loin ou de près, je vous serre tous sur mon cour. Adieu.
Ton ami, ton camarade, ton mari.
P.S. J'ai quinze mille francs dans la valise de la rue de
Plaisance. Si tu peux les prendre, rends mes dettes et donne le reste à Armène. »